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Avec Cheikh Lô, la musique n’a pas de frontière

Nouvel album Balbalou de Cheikh Lô - Chapter Two

Dreadlocks infinies et silhouette longiligne, Cheikh Lô vous ne pouvez pas le manquer. Sa musique non plus.

Autodidacte, élevé à l’école du “Volta”, Cheikh Lô manie sa voix et les rythmes jazz, mbalax, highlife, mandingues et afrolatins avec une science incroyable.

Accompagné des très en vogue Fixi, Flavia Coelho et Ibrahim Maalouf, et de la grande griotte malienne Oumou Sangaré, il sort son 5ème album, Balbalou.

Interview de l’artiste le plus “cool” de la sphère musicale.

Votre nouvel album est au croisement de plusieurs univers musicaux. Il est un album tour du monde à l’image de votre carrière ?

Cheikh Lô : Oui, peut-être que cela est lié au fait que j'ai quarante ans de carrière. J'ai acquis une petite expérience pendant ces quarante années. J'ai toujours pensé qu'il fallait s'ouvrir aux autres et que la musique n'avait pas de frontière.

On peut faire jouer ensemble des musiciens de différentes nationalités alors qu’ils ne parlent pas la même langue. Ils communiquent avec un autre langage. J'ai depuis longtemps ce désir d'ouverture et mon répertoire est panafricain.

Cheikh-Lô


Pour l'album Lamp Fall en 2005, j'avais déjà créé avec des artistes brésiliens. Sur ce nouvel album, Flavia a apporté sa touche, une merveilleuse touche. Fixi (Ndlr : joueur d’accordéon ayant récemment joué aux côtés de Winston Mac Anuf) et Flavia sont venus à Dakar là où nous avons tourné la vidéo du clip, dans la ville de Saloum.

On a joué un live dans la capitale avec Flavia et Fixi. On a dû refuser du monde. C'était plein, archi plein. C'était la première fois que je jouais avec toute une section de vents, avec un big band à Dakar. C'était extra !

Dans cet album, vous interpellez les chefs d’Etat africains - dans Doyal Naniou par exemple - vous mettez en exergue la spiritualité en opposition aux méfaits perpétrés par Boko Aram. Engagé et humaniste, c’est cela qu’est votre nouvel album Balbalou ?

Cheikh Lô : Oui. Je dis à ceux désirant diriger l'Afrique : "On se dirige doucement vers la démocratie. Il faut renforcer cette démocratie. Les coup d'Etat, ce sont des coup bas." Il faut laisser les chefs d'Etat faire leur mandat tranquillement.

Si on arrive à faire comme au Nigeria, un seul mandat voire deux ou comme au Sénégal, notre président s'est engagé à ne gouverner que cinq ans. On avancera.

Vous appartenez à la confrérie de Baye Fall. Que signifie-t-elle pour vous ? Comment influence-t-elle votre art ?

Cheikh Lô : Ma religion est là. C'est ma foi. J’appartiens à cette communauté qui est souvent confondue avec les rastas car nous portons des dreadlocks, des ceintures et des patchworks.

Lorsque le mouvement rasta a commencé à être connu grâce à Bob Marley, mon guide spirituel Baye Fall, qui vient de nous quitter, avait déjà développé notre confrérie. Dans ma musique, je parle de cette distinction.

Vous débutez batteur à Bobo Dioulasso, passez par Dakar et Paris. Vous jouez de la batterie pour Papa Wemba. Vous vous exercez ensuite à la guitare. Vous êtes touche à tout. D’où vous vient ce désir perpétuel de créer ?

Cheikh Lô : Depuis mon départ dans la musique à Bobo Dioulasso, là où je vois le jour, je suis au carrefour de beaucoup d’influences. Cette ville est proche du Mali, de la Côte d'Ivoire et du Ghana.

Dans le premier groupe où j’ai joué il y avait plusieurs nationalités différentes. Beaucoup de styles de musique et de langues différentes. Je jouais tous ces styles à la batterie et à la conga. Je grattais quelque fois la guitare à la maison. Tout cela m'a beaucoup influencé. A Dakar, je jouais de la variété et de la musique pop.

Voilà pourquoi il y a ces reflets dans ma musique. J'ai peut-être eu cette chance d’avoir été à l'école du “Volta”. Je suis autodidacte et c’est avec ces différents groupes que j’ai tout appris.

Sur le morceau Degg Gui, Fixi joue de l’accordéon et la brésilienne Flavia Coelho chante. De quoi parle ce morceau ?

Cheikh Lô : La vérité. La vérité vient au premier plan


Cheikh Lô feat. Flavia Coelho & Fixi - Degg Gui

ZOOM

Le portrait chinois de Cheikh Lô

Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e). Qui seriez-vous ?

Cheikh Lô : J'aime Léopold Sedar Senghor car il a écrit sur la négritude. Egalement, Aimé Césaire et Camara Laye.

Si vous étiez un(e) réalisateur(trice) africain(e). Qui seriez-vous ?

Cheikh Lô : Idrissa Ouedraogo. Il avait gagné le Grand prix à Cannes en 1990 (Ndlr : Le Grand prix du Jury pour le film Tilaï). Il m’avait demandé de venir animer la cérémonie à Cannes avec mon groupe. C'est grâce à lui que le Fespaco existe au Burkina Faso. C’est un grand homme.

Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?

Cheikh Lô : Je serais toujours le même Cheikh Lô. J'ai beaucoup écouté Tabu Ley Rochereau, Labah Sosseh, Le Bembeya jazz, Franco, Le Maravillas de Bamako, Salif Keïta et Kanté Manfila... J’aime beaucoup la musique des années 1970. C’est difficile d’en choisir un.

Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?

Cheikh Lô : Je serais le sublime plat sénégalais tiep bou dien. Le riz au poisson parfumé d'épices. Chaque jour au Sénégal, tu peux manger un plat différent. Les femmes sénégalaises sont comme des artistes peintres. Elles imaginent des mélanges sublimes.

Propos recueillis par Eva Dréano