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LASSY KING MASSASSY : Ode à une Afrique « dynamique, inventive, fertile »

Le photographe malien dévoile les secrets de la réussite de l'Afrique : l'anarchie productive et l’informel organisé ; la solidarité.

Le polyvalent artiste malien Lassy King Massassy est déjà connu comme comédien, rappeur et slammeur.

Comme acteur il s'est déjà fait remarquer dans " Bougougniere invite à dîner ", écrit par Jean-Louis Sagot-Duvauroux et Alioune Ifra Ndiaye, mis en scène par Patrick Le Mauff, dans lequel il incarne des triplés, et dont de nombreuses représentations ont été données en France tout comme au Mali.

Aujourd’hui, grâce au galeriste et commissaire d’expositions Olivier Sultan c’est à Paris à la Galerie Art-Z (27 rue Keller, Paris 11ème) qu'un autre aspect de cet artiste décidément touche-à-tout est mis en lumière, à savoir sa photographie, via deux séries, l’une en noir et blanc et l’autre en couleur : « Insolence » et « Anarchie productive ».

Lassy-King-Massassy

Paix intérieure brute. © Fotolala King Massassy 2017

La première, « Insolence », met en scène avec solennité des personnages, notamment des enfants, de profil sur un fond clair sur lequel se laissent voir l’horizon et une étendue d’eau. King Massassy confère à ces héros méconnus un éclat et une grâce beaux et désarmants. Les photos questionnent également le rapport au monde et aux technologies, comme le suggère la présence d’une radio.

La série « Anarchie productive » quant à elle se compose de photographies festives, solaires, sur fond jaune, dans lesquelles là aussi les enfants sont majoritairement présents, telle une promesse d’espoir et de lendemains plus rieurs.

Pieds-d-acier-King-Massassy-2017

Pieds d’acier. © Fotolala King Massassy 2017

S’il savait trouver les bons mots pour épingler avec justesse des injustices ou exactions en rapport avec l’Afrique, Lassy King Massassy sait tout aussi bien mettre en valeur des personnes, des objets, des situations, en leur octroyant, par son regard bienveillant et sa qualité de composition du cadre, une aura, une dignité et une noblesse particulières.

Il sait rendre beaux une porte rouillée, un portable rudimentaire, des caisses de bouteilles et d’autres objets du quotidien semblablement sans aucun intérêt : là réside toute la magie et l’importance citoyenne de son travail.

A rebours des photographies de l’Afrique misérabilistes et chagrines, les photos de Lassy King Massassy véhiculent cependant aussi des messages forts, mais ce sont des messages d’espoir qui chantent la résilience et la débrouillardise des habitants de cette Afrique en laquelle il croit fermement.

Ce qui fait la réussite également de cette série en couleur est, comme le souligne Olivier Sultan, cet équilibre entre mise en scène et documentaire, puisque les sujets photographiés « jouent » leur propre rôle et qu’il ne s’agit pas de mannequins. Le côté documentaire et joyeux fait penser à Malick Sidibé, le travail sur le cadre et la mise en valeur des sujets à Seydou Keita ; en bref les deux grands pionniers de la photographie malienne.

ZOOM

Note d'information de Lassy King Massassy

« Elle (l’Afrique) doit cesser de regarder le monde à travers ses lunettes de victime inconsolable.

Elle doit cesser d’être vue comme un navire à la dérive. A travers cette série photographique, j’entends montrer combien l’Afrique est dynamique, inventive, fertile.

Je souhaite dévoiler les secrets de sa réussite : l'anarchie productive et l’informel organisé ; la solidarité. Je veux faire connaître cet Africain qui use d’ingéniosité jusqu’aux derniers replis de son imagination pour vivre, inventer, créer.

L’avenir est un présent pétri par le passé et non un hypothétique futur conjugué au conditionnel. L’utopie africaine n’est pas à inventer. Elle est. »

Matthias Turcaud