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LASS, attention : pépite !

Wagram / Chapter Two

Un premier EP très complet

Après avoir collaboré avec Synapson, Lass dévoile à présent son premier EP, original, investi, et témoignant d'un style déjà très affirmé.

Comment la musique est-elle entrée dans votre vie ?

Lass : J'ai été contaminé par cet amour de la musique par mes grands frères qui organisaient pas mal de soirées de musiques africaines où on pouvait écouter, danser, chanter toute la musique de l'Afrique de l'Ouest. On m'a souvent interdit d'assister aux soirées, mais c'était pour moi impossible d'obéir.

Quand avez-vous décidé de devenir artiste ?

Lass : Je n'ai pas choisi de devenir artiste, c'est venu comme ça, avant je voulais devenir footballeur mais je n'étais pas si bon, au début on a commencé avec des amis du quartier juste pour draguer les filles, après on a commencé à être sérieux et on s'est rendu compte que ce n'était plus un jeu et c'est vraiment devenu sérieux.


Avez-vous suivi une formation vocale particulière ?

Lass : J'ai appris dans la rue en écoutant d'autres chanteurs que j'aimais. J'avais l'habitude d'aller sur la plage tous les matins pour chanter face à la mer. C'était une routine, et ça a forgé ma voix. J'essayais de chanter plus fort que les vagues, et ce n'est pas rien, car devant cette immensité d'eau, il n'y a aucun écho. Il faut pousser dans le ventre pour se faire entendre face à la mer, c'était comme un entrainement artistique, mystique et physique à la fois.

Comment avez-vous su trouver votre style ?

Lass : Je viens du reggae, avant je faisais et aussi j'écoutais beaucoup de musique jamaïcaine, particulièrement Garnett Silk. Mais c'est la rencontre avec Bruno Patchworks qui m'a permis de retourner à la source de la source pour plonger dans la musique du groupe Orchestra Baobab, Bembeya Jazz... et le groupe Synapson pour l'électro m'a permis de trouver aujourd'hui mon style, un mélange de musique plus électro.

Quel souvenir gardez-vous de votre collaboration avec Synapson ?

Lass : Avec Synapson j'ai joué devant des Zéniths, des festivals en feu et ce fut un pur bonheur. Je me souviens de nos délires dans les tournées, d'une impression de simplicité, et de notre envie d'avancer..

LASS 2 - crédit photo Matar Mbengue

Crédit photo : Matar Mbengue 

Comment le morceau "Mo Yaro" a-t-il vu le jour ?

Lass : C'est un morceau sur l'éducation. Il est né d'un constat général de ce qui se passe maintenant dans l'éducation et de ce que l'on transmet à nos enfants et aux générations à venir. Je parle de la fierté de transmettre les bonnes manières. Car maintenant, on perd certaines valeurs de « bonne » éducation. On laisse Instagram, Facebook, la télé éduquer nos enfants à notre place, même si je ne blâme pas les parents qui font souvent ce qu'ils peuvent... Je rappelle juste que ce qu'on leur transmet au quotidien est essentiel dans leur épanouissement. Dans notre société, on revient du travail fatigué, on laisse la télé et les réseaux sociaux nous remplacer nous parents pour faire l'éducation de nos enfants et ça c'est vraiment dangereux.

On attend aussi votre EP... Comment l'avez-vous construit, structuré ?

Lass : Sur cet EP, on a beaucoup travaillé sur la recherche de sonorités des rythmes, des mélodies africaines, parce qu'il fallait représenter d'où on vient. Ensuite on a travaillé avec des producteurs, Beakmekers comme Bruno Patchworks, Synapson, Sébo Beats et Raphael D'Hervez pour la réalisation, afin d'obtenir différentes couleurs.

Quels artistes, notamment sénégalais et africains, vous inspirent-ils notamment ?

Lass : Les artistes sénégalais africains qui m'ont inspiré sont nombreux mais ceux qui m'ont vraiment marqué sont l'Orchestra Baobab, Youssou Ndour, les Touré Kunda, Bembeya Jazz. Ce sont des artistes et des groupes qui ont bercé toute ma jeunesse.

De quelle manière l'inspiration vient-elle vous rendre visite ?

Lass : L'inspiration, c'est quelque chose de magique, mystique que je ne peux pas définir ou expliquer, elle vient naturellement chez moi. Elle vient en moi quand je suis seul et que je laisse mon "spirit" voyager à travers les thèmes que je veux développer, mais c'est quelque chose qu'on ne contrôle pas, ni un bouton sur lequel on appuie pour que ça arrive. L'environnement est très important pour être bien inspiré. De manière générale, je m'inspire de ma vie, de mon quotidien, de la société qui m'entoure.

Quelle part laissez-vous à l'improvisation dans votre travail ?

Lass : L'improvisation est très importante dans ma carrière, dans la façon dont je construis ma musique, dans la façon dont j'écris, j'aime bien improviser. Ça me permet de trouver des lyrics, des idées auxquelles je n'avais pas pensé. Je travaille avec un groupe qui s'appelle Voilaaa avec tois (AAA), d'où le fait que l'improvisation est très essentielle sur scène.


Pourriez-vous nous décrire une journée de travail habituel ?

Lass : Réveil très sport, j'aime bien courir le matin, après une bonne douche, c'est le café, j'écoute de la musique, je plonge dans l'univers avec des recherches sur ce que je veux faire, des heures après c'est le studio toute la journée, j'enregistre beaucoup, on peut dire que le studio est ma deuxième maison. 

Qu'éprouvez-vous quand vous chantez ?

Lass : Je vibre avec les gens, je partage avec le public beaucoup de moments d'amour quand je chante, j'aime quand je vois les sourires sur les visages du public, ça me fait tellement du bien, je suis content de transmettre ça.

Quels sont vos projets à présent ?

Lass : La suite, je l'imagine avec beaucoup de partage avec le public. J'ai chanté dans des clubs bondés jusqu'à l'aube avec Voilaaa, devant des Zéniths en feu avec Synapson, donc maintenant j'aimerais faire des grandes choses avec mon propre projet. J'aime la scène, et je veux vibrer avec les gens. 2022 aussi, ce sera l'année de mon premier album. On y travaille beaucoup en ce moment, j'espère que les gens l'écouteront. J'espère que les gens seront prêts à aimer un chanteur en Wolof, qui vient de loin. Je vois en France la société qui se crispe, les tensions identitaires... Mais une grande partie des Français ne veulent pas de ça, je le sais. Je ferai tout à travers ma musique pour rassembler les gens.

Remerciements chaleureux à Lass et Clara Smal.

ZOOM

La réalisation du clip

Le clip est très original et innovant. Comment a-t-il été élaboré ?

Lass : C'est une idée originale de Peter the Moon qui est un artiste lyonnais, pas juste un réalisateur de clip, mais un musicien qui joue dans plusieurs groupes. Il utilise d'habitude une technique de Stop Motion pour réaliser des clips à base d'images découpées qu'il anime ensuite.

Avec lui cette fois nous avons voulu aller plus loin et mélanger cette technique Stop Motion avec de la vidéo, c'est ce qui donne l'aspect original du clip Mo Yaro. Dans le thème, on voulait mélanger ce principe de travail vintage avec des images d'une Afrique futuriste, tout en faisant danser les gens. J'espère que c'est réussi.

Matthias Turcaud