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Toma Sidibé : " Pour moi, la vie est une danse "

Nouvel album Bal poussière - Production Seya et Océan nomade

Pour Toma Sidibé la musique est prétexte à la fête et au partage.

Avec Bal poussière, son 6ème album sorti en avril, Toma Sidibé nous invite à rentrer dans la danse sur fond de rythmes reggae, mandingue et de sons urbains.

Interview avec l’artiste qui offre fête et gaieté, non pas en barre mais en CD.

Votre nouvel album, Bal poussière, vient de sortir. Comment composez-vous un album ? Comment Bal poussière a été pensé ?

Toma Sidibé : Dans mes précédents albums, j'avais essayé de raconter une histoire du début à la fin de l'album. Dans Matin d'exil, par exemple, chaque chanson était un épisode de l'histoire d'Amadi qui quittait le Mali pour rejoindre l'Occident. L’album Génie Donkili, qui s'adresse au jeune public et dont Soro Solo (Ndlr : animateur de l’émission L’Afrique enchantée) fait la voix du conteur, est une quête pour réveiller le génie de la musique qui est en nous.

Dans ce nouvel album, j’ai pris le parti de faire que chaque chanson raconte une histoire. Parfois, il y a des chansons qui te tombent dessus. Parce qu'il y a des événements qui te touchent et tu as envie d'en faire des chansons.

Le morceau Docteur Manamanakanfola parle de certains docteurs qui, en Afrique, se servent de leur titre pour profiter des gens. C'est l'histoire qui est arrivé à un de mes amis qui était gravement malade. Dans ce genre de situation, tu es désemparé et tu as envie de jouer de la musique pour dépasser ce que tu vois ou ce qui t’arrive.

Toma-Sidibe


Parfois comme c'est le cas pour la chanson Miss Dialo, le titre est venu avec la rythmique des mots. Je crée différemment en fonction des morceaux. Je me laisse porter par eux. Pour le titre de l'album, Bal poussière, ça évoquait beaucoup aux gens. Et pour moi la vie, c'est une danse.

Tu es poussière et tu redeviens poussière. J'imagine aussi que tous les personnages dont je parle dans cet album, se sont rencontrés un jour dans un bal poussière.

Pouvez-vous nous dire à quel public s'adresse Bal poussière ?

Toma Sidibé : Cet album s'adresse à toutes les oreilles qui ont envie d'entendre des histoires à cheval entre des frontières. A tous les gens qui ont envie d'écouter des musiques inspirées de l'Afrique avec des sons urbains. On trouve dans cet album un ngoni avec un son électrique, du beatbox… ça s'adresse à tout le monde.

Il y a des valeurs dont vous semblez être particulièrement attaché comme le partage, la générosité... Comment cela s'applique dans votre travail de création ?

Toma Sidibé : Dans mon travail de création, j'ai envie de m’entourer de gens que j'aime. Egalement, je veux que les personnes avec lesquelles je travaille, me donne ce qu'elles ont envie de donner sur le projet. Tous les artistes qui sont là sur ce concert dans le cadre du festival Complet'mandingue ont participé activement à la fabrication de ce nouvel album.

J'essaye de coordonner les musiciens, les différentes personnes avec qui j’ai fait cet album pour qu'on puisse avancer ensemble. Aujourd'hui, la sortie de cet album et le concert de ce soir, c'est la concrétisation de 3 ans de travail. Tout ce qu'on a fait, le public l'a reçu. Tout cela, leur appartient aussi maintenant.

Vous avez souvent travaillé avec des publics jeunes. Pourquoi ce choix ?

Toma Sidibé : C'est d'abord arrivé au moment où j'ai eu des enfants. Cela me permettait de jouer la journée et de voir mes enfants le soir. Le réseau jeune public est très étendu. C'était pratique.

Mais surtout dans les spectacles jeunes publics, je me permets de tout faire. Je danse. Je saute en l'air. Je parle avec mes instruments comme si c'était mes potes. Cela me permettait d'aller plus loin dans la création. De vraiment me lâcher.

Et puis, il y a l'aspect éducatif. Le côté transmission me plait beaucoup. C'est pour cela que je fais beaucoup d'ateliers de création avec les enfants. C’est aussi un moyen par exemple de valoriser ce que les enfants ont en eux. J’essaye de les aider à le révéler.

Vous vous dites afro-picard, malien... Vous êtes porteur de nombreuses identités ?

Toma Sidibé : On peut et on doit inventer sa vie. Egalement, lorsqu'on découvre une nouvelle culture, on se ré-invente son éducation et sa culture. On prend, on prend et puis, on s'imprègne d'une nouvelle identité. Je suis né à Abidjan. J'ai grandi à Amiens en Picardie et il est toujours resté quelque chose en moi de cette Ivoire natale. J'ai toujours aimé l'Afrique et j'ai voyagé assez jeune. Je faisais de la batterie, à l'époque. Les percussions africaines m'ont donc parlé très tôt.

Je suis revenu faire mes études en France et j'ai trouvé un moyen de repartir en Afrique. Je suis parti au Mali dans le cadre de mes études à l’Inalco (Ndlr : L’institut d’Etudes des langues et des civilisations). Et après, je suis revenu régulièrement au Mali pour y jouer avec différents groupes en tant que batteur, au départ. "Afro-picard", c'est un clin d'oeil à beaucoup de gens que je connais qui sont nés et ont grandi en Picardie. L’un d’eux se revendiquait « malien-picard ». Cela fait d'eux de vrais personnages.


Vidéo de présentation de Bal poussière (Toma Sidibé)

ZOOM

Le portrait chinois de Toma Sidibé

Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e). Qui seriez-vous ?

Toma Sidibé : Amadou Hampâté Bâ

Si vous étiez un(e) réalisateur(trice) africain(e). Qui seriez-vous ?

Toma Sidibé : Abderrahmane Sissako car j'ai vu Timbuktu récemment. Il y a plusieurs amis à moi qui jouent dedans. Fatoumata Diawara, par exemple. J'ai vraiment trouvé son film très beau, très poétique.

Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?

Toma Sidibé : Je vais faire un second petit clin d'oeil à un tonton qui habite d'ailleurs à Poitiers maintenant. C'est Sixou Tidiane Touré, de Touré Kunda. Je trouve que Touré Kunda a une très belle histoire, entre l'Afrique et la France.

Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?

Toma Sidibé : Le mafé !! J'adore le mafé. J'ai beaucoup fatigué mes amis musiciens maliens avec lesquels je jouais au Mali. J'en mangeais tous les jours et eux en avaient vraiment marre.

Propos recueillis par Eva Dréano