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Salma Khalil, ambassadrice des Tchadiennes

A N’Djaména, Salma Khalil est incontournable, mais elle reste encore peu connue en dehors de son pays. Gros plan sur une artiste Tchadienne aussi enthousiaste qu’enthousiasmante.

Recenser toutes les activités de Salma Khalil donne le tournis, puisqu’en effet la trentenaire tchadienne dessine, peint, sculpte, prend des photos, crée des bijoux, des T-shirts et des sacs, écrit des nouvelles et a aussi fondé en 2014 l’association « Positive » avec laquelle elle permet à des femmes de s’initier à des activités artistiques.

A l’image du nom de son association, elle s’attache à donner du Tchad une image clairement positive et à rebours des clichés véhiculés par les médias.

Justine-photo-de-Salma-Khalil

Cette année, sur l’impulsion de l’ambassade de France au Tchad, Salma Khalil a photographié cent femmes tchadiennes émancipées, exerçant des métiers prestigieux, tels que juriste ou architecte, ou réputés plutôt masculins, tels que footballeuse, lieutenant maître-chien ou encore chauffeuse de taxis-motos qu’on appelle ici « clandos ».

Par la qualité de ses très beaux portraits - dont plusieurs ont été exposés à l’Institut Français puis au Lycée Montaigne à N’Djaména -, Salma Khalil met en lumière et confère une noblesse et une dignité supplémentaires à ces femmes qui se sont battues et se battent chaque jour pour ne pas être inféodées à un homme.

Cependant la polyvalente artiste a plus d’une corde à son arc, et, conformément à son tempérament rieur et optimiste, nombre de ses créations ne manquent pas d’humour : en témoignent ses illustrations de livres pour enfants fantaisistes et joyeuses, sa manière de croquer en quelques traits reconnaissables des femmes très expansives – elle a d’ailleurs commencé comme caricaturiste pour des journaux – ou encore les planches qu’elle a dessinées pour contribuer à une bande-dessinée collective parue sur la circulation à N’Djaména, et aussi civique qu’humoristique.

Quant à ses écrits Salma Khalil y traite avec courage de thèmes de société tels que l’expropriation ou encore l’homosexualité – dans la nouvelle " Liaison prohibée ". 

Salma Khalil a photographié cette footballeuse en hommage à ces femmes qui se battent chaque jour pour ne pas être inféodées aux hommes.


ZOOM

Salma Khalil et son premier rapport au Tchad

« Quand j’étais petite, j’habitais en Allemagne. Mon papa m’a montré une image sur ZDF montrant la guerre de Libye, pour moi ça n’avait rien à avoir avec moi et cette image m’a repoussé.

Pour m’intéresser, mon père a pris un papier et un crayon et a dessiné la carte du Tchad. Pour moi c’était le visage d’une personne, et pas une carte. Mon père a divisé le pays en trois bandes. Sur la première bande il a dessiné des dromadaires, sur la deuxième d’autres animaux sauvages et des montagnes - parce que je m’intéressais beaucoup à la nature.

Ma mère est aussi brodeuse, elle dessine également sur des bouts de tissus.

Tous les deux m’ont accompagnée dans la pratique du dessin. »

Matthias Turcaud